
Les couleurs ont toujours été employées pour éveiller et conscientiser certaines énergies. En effet, la méditation sur ces supports permet de nous harmoniser à certaines forces particulières, nous introduisant dans un état de conscience correspondant. C’est d’ailleurs ce qui explique l’usage sacré des couleurs dans l’ensemble des grandes religions. Plus près de notre tradition, pensons aux vitraux des basiliques, des chapelles et des cathédrales. Véritables œuvres d’art relevant d’une science ésotérique avancée, ils ont été conçus de manière à produire des effets psychiques bien définis. En effet, la technique du vitrail fut longtemps considérée comme l’une des méthodes les plus efficaces pour vivifier une couleur et la mettre en suspension dans l’air. C’est pourquoi, associée au support de la messe, de la prière ou d’une dévotion particulière, la couleur émise par un vitrail devient parfois la source mystérieuse d’une guérison ou d’une conversion. Ainsi, dans l’enceinte d’une cathédrale, tout devient possible à celui qui sait utiliser les puissants convertisseurs d’énergie que sont les vitraux. Assis devant un vitrail, la colonne vertébrale bien en contact avec le mur de pierre, une expérience fabuleuse peut donc être vécue, le rayonnement coloré stimulant les centres spirituels et psychiques qui structurent la conscience, entraînant le déploiement de perceptions tout à fait remarquables.
Dans cette perspective, il est intéressant de mieux connaître les rapport existant entre les chœurs angéliques et les couleurs de manière à utiliser ces dernières comme des outils de sensibilisation aux forces dont ils sont porteurs. Ayant conscience que les couleurs constituent de véritables lieux de jonction entre notre monde terrestre et les mondes spirituels, nous étudierons donc, pour chacun des chœurs angéliques, la couleur qui lui est associée afin de pouvoir mieux intégrer en soi les énergies dont ils sont les vecteurs.
Couleurs de la robe de chacun des chœurs angéliques
« Or, comme elles en était déconcertées, voici que deux Anges se présentèrent à elles en vêtement éblouissants. ». (Luc XXIV,4.)
Toujours très lumineuse, la robe de l’ange, symbole extérieur de son activité spirituelle, nous révèle toujours sa fonction particulière. A ce titre, la tradition hermétique en recense d »ailleurs neuf couleurs principales en corrélation avec les neuf chœurs angéliques.
Chœurs | Couleurs |
Séraphins | Or |
Chérubins | Argent |
Trônes | Indigo |
Dominations | Bleu |
Vertus | Rouge |
Puissances | Orangé |
Principautés | Jaune |
Archanges | Violet |
Anges | Vert |
Les séraphins
Une robe de couleur or est traditionnellement l’apanage des Séraphins. En effet, nous avons vu que les Séraphins invitent l’homme à vivre, de manière plus intense, une participation à la nature divine. Or la couleur or est précisément celle de la déification. Ceci explique d’ailleurs la raison pour laquelle les artistes chrétiens ont toujours représenté la tête des êtres réalisés (des saints) entourée d’une auréole dorée. Les aliments présentant une couleur voisine de l’or étaient également revêtus d’une importance symbolique toute particulière dans l’ensemble des traditions anciennes. Dans les mystères d’Eleusis, à titre d’exemple, les initiés d’un degré supérieur recevaient du miel comme signe de renaissance à une vie nouvelle (une re-création en quelque sorte). De même on bénissait du miel en l’honneur des nouveaux baptisés, les infantes, comme on les appelait alors, étant introduits dans un processus de déification comme en témoigne saint Cyprien : « Quand l’eau régénératrice eut effacé les taches de mon passé, et que mon cœur dès lors purifié se fut rempli d’une lumière d’en haut, lorsqu’un Esprit venu du ciel m’eut donné une seconde vie, et fait de moi un homme nouveau, ce fut un changement merveilleux… ». Ce miel leur était donc servi comme premier repas symbolique concrétisant leur entrée dans une vie nouvelle.
Les Chérubins
Dans la tradition de l’hermétisme chrétien, les Chérubins revêtent généralement une robe couleur argent. En effet, leur fonction est de transmettre l’intelligence illuminante (la sagesse) qui contribue à développer une vision qui s’unifie au lieu de se disperser et qui s’universalise en rassemblant toute chose autour de Dieu. Or Emile Gevaert nous précise à propos de la couleur argent qu’elle est « la lumière pure, telle qu’elle est rendue par la transparence de l’eau, les reflets du miroir, l’éclat du diamant; elle ressemble à la netteté de la conscience, à la pureté d’intention, à la franchise, à la droiture d’action; elle appelle la fidélité qui s’ensuit. ». En ce sens, cette couleur est le symbole d’une capacité à réfléchir d’une manière parfaite, sans déformation ou atténuation, la pure lumière de la puissance divine, rendant ainsi pleinement effectif ce qui était auparavant caché ou voilé.
Les Trônes
Les hermétistes attribuent traditionnellement la couleur indigo aux Trônes. En effet, ces êtres angéliques incarnent une aptitude à assumer le destin en se dépouillant de toutes choses inessentielles, devenant ainsi parfaitement vide et vierge en vue de recevoir la lumière de Dieu et de se remplir d’amour. Or l’indigo a toujours été associé à la couleur de la nuit qui joue un rôle prépondérant dans la théologie mystique. En effet, elle représente pour l’aspirant la disparition de toute évidence, une étape nécessaire pour permettre la descente de l’Esprit en son cœur.
Cette couleur évoque donc un processus par lequel l’aspirant « vide » son âme, devenant « libre de toutes les images étrangères, aussi disponible qu’avant sa naissance » pour reprendre les mots de Maître Eckhart. Et c’est seulement dans cet état de vacuité et de disponibilité retrouvé qu’il pourra alors recevoir Dieu et lui donner naissance en ce monde, enfantant l’Esprit (l’amour) dans ce monde hostile. C’est d’ailleurs au cours de la nuit la plus longue de l’année que naquit le Sauveur de la tradition chrétienne.
Les Dominations
Quand aux Dominations, elles sont traditionnellement revêtues d’une robe couleur bleue. En effet, ce chœur angélique incarne l’expérience de la joie profonde et authentique, source de paix et de grâces multiples. Or le bleu est traditionnellement associé à une paix indicible résultant d’une ouverture à l’amour indéfectible que Dieu éprouve vis-à-vis de Sa créature. C’est d’ailleurs sans doute l’origine des vertus apaisantes du bleu, bien connues de la tradition populaire. En effet, prenant conscience de cet amour divin, plus aucune crainte n’est possible, sachant , qu’au-delà de toutes les fluctuations et de toutes les mouvances de son existence, il bénéficiera toujours de l’amour du Créateur (c’est en ce sens que le bleu est également associé à la loyauté et à la fidélité).
Les Vertus
Une robe de couleur rouge est traditionnellement l’apanage des Vertus. En effet, nous savons que les Vertus incarnent une faculté à agir de manière juste, c’est-à-dire conformément à ce que dicte l’amour. En ce sens, elles amène l’aspirant à se libérer courageusement des forces mortifères (sources de mirages et d’illusions) pour mieux se placer au service de l’Esprit et pour en témoigner avec force et fidélité (c’est-à-dire sans le déformer), participant dès lors activement aux œuvres de Dieu. Or le rouge est traditionnellement une couleur associée à l’action dynamique, au courage, à la volonté et à la combativité.
Dans la langue populaire de tous les peuples la couleur du sang, le rouge, fut l’emblème des combats; au Pérou, les quipos teints en rouge désignaient les gens de guerre. Les Spartiates étaient ensevelis dans des linceuls rouges, cette couleur devait être affectée aux funérailles d’une nation qui n’avait d’autre existence que la guerre et qui ne reconnaissait d’autre vertu que le courage militaire. A ce titre d’ailleurs, il est bien connue que le rouge stimule, excite, active et dynamise. En chromothérapie, par exemple, il s’avère particulièrement efficace pour soigner l’anémie et l’apathie, la paralysie et la faiblesse.
Les Puissances
Les Puissances sont généralement revêtues d’une robe de couleur orangée. En effet, elles incarnent fondamentalement une faculté à rayonner avec enthousiasme les valeurs de l’amour. Or cette couleur est celle d’une expression plénière de la vocation de l’être puisqu’elle correspond au rayonnement de l’amour dans les aspects différentiés de la création (et de la réjouissance que ce rayonnement suscite). A ce titre d’ailleurs, il est éloquent de constater que l’orangé fut, dans toute l’antiquité grecque, la principale couleur attribuée au Dieu Dionysos. En effet, d’après le témoignage de Pollux, cette divinité portait un vêtement de couleur orange et, dans les représentations scéniques (dionysies), elle paraissait toujours sous ce costume.
Or les cultes dionysiaques invitaient précisément à briser toutes les valeurs superficielles afin de redonner vie aux valeurs véritables de l’être (à celles de l’amour). En ce sens, ils comportaient des rites de défoulement dont l’exubérance était censée mettre en échec l’effet négatif des interdits, des tabous, des préjugés et des a priori, c’est-à-dire de tout ce qui brimait l’homme au niveau de son expression véritable. A ce propos, Boyancé affirme très justement que « le propre de la purification dionysiaque est de porter à son comble ce dont il faut délivrer l’âme. ».
Les Principautés
Les hermétistes attribuent aux Principautés la couleur jaune (plus précisément un jaune tirant sur le vert, comme celui de l’éclat de la chrysolithe). En effet, ces êtres angéliques sont étroitement associés à une expérience d’extase au cours de laquelle la conscience transcende son rapport avec le créé pour être propulsée à un niveau supérieur d’existence. Or le jaune évoque essentiellement une notion d’achèvement, de plénitude et de maturité. A ce propos, il d’ailleurs intéressant de noter qu’une chevelure blonde était souvent l’apanage des héros. Elle était même chez les Celtes, le signe d’une beauté royale. Dans cette perspective, les artistes chrétiens ont parfois représenté le Christ avec des cheveux blonds pour ainsi souligner la perfection de sa nature humaine. Toutefois, le jaune revêtu par les Principautés et moins un jaune orangé qu’un jaune tirant sur le vert. Or nous verrons que le vert incarne essentiellement une ouverture aux forces de l’amour. Dès lors, cette couleur évoque davantage un état de plénitude vécue en tant qu’ultime étape amorçant une ouverture (une transcendance) vers une autre réalité : celle de l’amour.
Les Archanges
Les Archanges sont habituellement revêtus, dans la tradition hermétique, d’une robe violette. En effet, ce chœur angélique incarne, comme nous l’avons précisé antérieurement, une aptitude à établir un rapport de médiation plus étroit avec le Créateur. Or la couleur violette est une couleur froide qui occupe une position extrême sur le spectre des couleurs visibles. En effet, au-delà de celle-ci, c’est le monde de l’invisible (l’ultra-violet). Il s’agit donc d’une couleur dont l’effet principal est d’affranchir du monde d’en bas pour élever la conscience vers les sphères divines.
Les Anges
Enfin, les Anges sont généralement revêtus d’une robe de couleur verte puisqu’ils incarnent une aptitude à se placer dans une disposition de réceptivité et d’ouverture face aux forces de l’Esprit (celles de l’amour). En effet, le vert se situe au centre du spectre visible, entre les couleurs chaudes (rouge, orange et jaune) et les couleurs froides (bleu, indigo et violet) bien qu’il soit généralement considéré lui-même comme une couleur froide. En raison de cette position centrale, il occupe un lieu mystérieux où semble s’opérer un certain renversement des choses. En fait, il évoque une réorientation de la conscience vers des valeurs plus intérieures (les couleurs froides étant centripètes et endothermiques par rapport aux couleurs chaudes, centrifuges et exothermiques) en favorisant une ouverture de la conscience aux réalités de l’amour. A ce titre, notons que dans l’Apocalypse, il est ordonné aux sauterelles de ne faire aucun mal à l’herbe de la terre, ni à aucune verdure, ni à aucun arbre; et de n’en faire qu’aux hommes qui n’auraient pas le sceau de Dieu sur leur front. (Apocalypse IX,3-4) Cette opposition de la verdure et des profanes démontre assez clairement que la couleur verte est symbole d’ouverture aux réalités divines.
Conclusion
Ces couleurs et le nombre infini de teintes et de nuances qu’elles peuvent revêtir nous révèlent donc toujours un aspect précis de la fonction céleste des anges ainsi vêtus et la nature des forces qui émanent d’eux. L’aspirant recevra d’ailleurs souvent cette force sous l’apparence d’un manteau déposé sur lui.
Source : Introduction à l’astro-angéologie. Charles-Rafaël Payeur. Editions de l’Aigle
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