Les Quatre-Temps d’automne

Symboles des temps de l’année. — Les féries des Quatre-Temps étaient, dans la primitive Église, de véritables fêtes de la nature ; elles nous montrent à quel point la liturgie des premiers âges prenait racine dans la nature. L’année liturgique est une véritable année de la nature ; de même, le jour liturgique est un véritable jour de la nature. Il nous est donc facile de comprendre que les quatre saisons de l’année aient également joué un rôle dans le symbolisme de l’ancienne Église.

Les premiers chrétiens ont emprunté ce symbolisme aux païens qui aimaient à personnifier les quatre saisons ; mais les chrétiens ont donné à ces saisons une signification plus profonde. Si, pour l’antiquité païenne, les saisons n’étaient que la personnification des forces de la nature, peut-être aussi le symbole de la vie terrestre, de l’abondance et de la croissance de la nature, elles devinrent pour les chrétiens l’image de la vie future, exprimée par cette formule concrète : le symbole de la résurrection de la chair ; car la mort et le renouvellement de la vie dans la nature étaient pour les chrétiens une image expressive de la mort et de la résurrection future.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

L’AUTOMNE ECCLÉSIASTIQUE

Dans le Missel la succession des dimanches après la Pentecôte est interrompue par l’insertion entre le XVIIe et le XVIIIe dimanches, de la messe des Quatre-Temps (Mercredi, Vendredi, Samedi). Cette coupure est pleine de sens : l’Église veut nous dire : Maintenant nous entrons dans la dernière période de l’année liturgique que nous pouvons appeler l’automne ecclésiastique. Mais les Quatre-Temps ne sont plus célébrés actuellement entre ces deux dimanches, puisque la date de ceux-ci varie sensiblement avec les différentes années ; ils tombent toujours dans la troisième semaine du mois de septembre (le mercredi qui suit l’Exaltation de la Sainte Croix). Au cours des trois dimanches précédents (XVeXVIIe), le thème de la parousie se faisait déjà sentir fortement ; dans les dimanches qui suivent, l’attente du second avènement du Seigneur sera le thème exclusif. Examinons brièvement ce temps qui va commencer.

A cette époque, l’aspect extérieur de la nature change : les feuilles des arbres se décolorent et tombent, les soirées deviennent plus longues, le froid fait son apparition et les brouillards d’automne étendent leur voile sur la campagne. L’Église célèbre, elle aussi, l’automne ecclésiastique. Ce sont les dernières semaines de l’année liturgique avec leurs pensées et leur caractère nettement définis. Nous pouvons parler de la mystique et du symbolisme propres de l’automne ecclésiastique que la liturgie s’ingénie à exprimer. Ce temps doit être pour nous une préparation aux fins dernières, ou bien, selon l’esprit de la primitive Église, au second avènement du Christ. (L’avènement du Christ à la mort de chacun et son avènement au dernier jour sont pour la liturgie une seule et même chose). On remarquera que l’antique liturgie n’envisage pas tant le jugement dernier, avec ses circonstances effrayantes, que le retour du Seigneur dans tout l’éclat de sa majesté, mettant le point final à la Rédemption. L’Église veut nous inspirer moins des sentiments de crainte que des dispositions et des motifs positifs d’ardent désir, de détachement de la terre et d’empressement pour le bien. C’est donc la vertu théologale d’espérance que la liturgie nous fait exercer et cultiver sous des formes extraordinairement variées pendant ces semaines-ci. Dans la pensée de l’Église primitive, il s’agit de l’attente du retour du Christ (la parousie). C’était l’un des grands arguments de la primitive Église pour encourager la sainteté, au martyre et au mépris du monde. Les premiers chrétiens ne vivaient pas seulement dans la foi du Christ et dans son amour, mais aussi et beaucoup dans l’attente de son retour. Dans ce sens, l’espérance a deux aspects ; l’un négatif : il s’agit alors de se détacher des biens et des jouissances de la vie, de se considérer comme un étranger sur terre, de ne pas river son cœur aux choses de ce monde ; c’est l’affranchissement de la matière. L’aspect positif : le désir du ciel, l’attente du Christ, la pratique de la vertu pour être parfait « au jour du Christ ». – Toutefois l’Église ne veut pas faire de nous des utopistes ; elle ne nous transporte pas dans l’autre monde, mais elle nous laisse sur la terre et nous enseigne à considérer et à mener la vie terrestre à la lumière de la parousie. Quand nous lisons les textes liturgiques de ce temps, nous y trouvons en abondance le dogme, la morale, l’ascétique et la mystique.

La liturgie nous brosse, dans ses textes, de magnifiques images : Elle nous conduit dans la salle de festin de l’Église, brillamment illuminée ; nous sommes vêtus de la robe blanche du baptême et nous attendons que le roi vienne rendre visite à ses hôtes (parousie) ; c’est la plus belle image de ce temps (XIXe dimanche). Ensuite elle nous conduit dans l’exil babylonien de la vie terrestre, nous fait supporter les épreuves de l’exil en esprit de pénitence, nous fait chanter : « Nous étions assis auprès des fleuves de Babylone et nous pleurions… » (XXe dimanche). Ensuite elle nous équipe d’une armure pour le combat spirituel et nous fait combattre « au mauvais jour » ; ou bien elle nous conduit devant le tribunal du Juge éternel (XXIe dimanche). Elle nous montre la prison de la Vie terrestre, mais fait aspirer à la patrie céleste (XXIIIe dimanche). Nous voyons comment le Divin Moissonneur rentre les gerbes mûres dans la grange céleste, mais aussi comment Satan brûle dans les flammes de l’enfer les bottes toutes prêtes de mauvaise herbe (cf. l’image bien connue de l’ivraie, Ve dimanche après l’Épiphanie, lue si l’année comporte 26 dimanches ou plus après la Pentecôte l’antépénultième dimanche). Enfin nous voyons la grandiose image du jugement dernier.

Ce sont surtout les messes du dimanche qui reflètent le caractère et les pensées d’un temps ; c’est encore le cas ici ; c’est donc à elles, en premier lieu, que nous demanderons de nous faire entendre les enseignements de l’automne ecclésiastique. Il y a cependant une foule d’autres sources et textes qui complètent ces enseignements. Ce sont, en second lieu, les fêtes de ce temps qui se mettent fréquemment au service de l’automne ecclésiastique. La première place appartient ici à l’Assomption (15 août), une vraie fête de moisson ; Marie est le fruit le plus mûr du jardin de l’Église. – Un peu plus loin se place la fête de l’Exaltation de la Sainte Croix (14 septembre) : la croix s’élève en se détachant sur le ciel obscur d’automne qui symbolise la puissance de l’enfer ; nous voyons déjà « le signe du Fils de l’homme Il qui apparaîtra dans le ciel à son second avènement. – Vient ensuite la fête de l’archange saint Michel, le chef des milices célestes dans le combat contre Lucifer et ses suppôts ; ce combat atteindra précisément sa phase culminante à la fin des temps. – Tout à la fin du temps d’automne, arrivent les deux fêtes de la Toussaint et de la Commémoration de tous les fidèles trépassés : à la Toussaint, l’Église écarte le voile du ciel et nous montre l’Église triomphante ; à la fête des morts, elle nous place devant la tombe et nous conduit dans les sombres régions de l’Église souffrante. La fête du Christ Roi se trouve également à la fin au temps d’automne. – En novembre, l’Église célèbre deux fêtes de la Dédicace [Voir ici et ici]dans lesquelles elle nous montre la Jérusalem céleste dans sa splendeur, mais aussi l’Épouse du Roi qui se pare pour son Époux.

Les lectures d’Écriture de ce temps se situent, elles aussi, dans le cycle des pensées caractéristiques de l’automne ecclésiastique. Comme on le sait, l’Église a établi un plan de lectures liturgiques propres qui s’adaptent dans la mesure du possible à l’année ecclésiastique. Le mois de septembre est le premier mois d’automne ; le développement progressif des ténèbres est l’image expressive du combat des ténèbres, qui montreront justement leur puissance dans les derniers temps. Pendant ce mois, l’Église nous présente les livres de la souffrance et de l’héroïsme : Job, Tobie, Judith et Esther, images du chrétien et de l’Église qui doivent persévérer jusqu’à la fin pour obtenir la couronne. Le mois d’octobre tout entier nous fait admirer les luttes héroïques des Macchabées ; c’est en quelque sorte l’illustration de l’Épître du XXIe dimanche sur l’armement en vue du combat spirituel. Le mois de novembre est réservé à la lecture des livres prophétiques qui ont rapport à la fin des temps : ils nous annoncent l’établissement définitif du royaume du Christ ; ils parlent des derniers temps, du passage du royaume terrestre de Dieu au royaume céleste.

Enfin la liturgie nous fournit encore une dernière source d’enseignement pour le temps de l’automne ecclésiastique ; ce sont les messes du commun des saints. Dans l’esprit de l’Église, ces messes, tout en gardant toujours le même texte, doivent très certainement subir l’influence caractéristique du temps ecclésiastique. A la lumière de Noël, elles apparaîtront tout autres que dans le rayonnement de Pâques et aussi que dans le crépuscule des derniers temps. C’est pourquoi nous découvrons sans surprise que la plupart des messes du commun portent l’empreinte des derniers temps. Presque toujours il y est question de la venue et du retour du Seigneur. Dans sa mort, le saint connaît par expérience le retour du Christ, et nous le vivons avec lui au Saint-Sacrifice ; c’est là le sens profond d’une messe de saint. C’est la raison pour laquelle nous comprenons peut-être mieux que jamais, pendant l’automne ecclésiastique, le sens d’une telle messe. Ainsi les saints nous préparent chaque jour à la parousie. Tantôt nous sommes le serviteur vigilant qui, les reins ceints, se porte à la rencontre de son maître quand celui-ci frappe à la porte ; tantôt l’homme qui a fait produire aux cinq talents reçus cinq autres talents. Puis nous prenons place parmi les jeunes compagnes de la fiancée qui ont su tenir leurs lampes garnies d’huile pour recevoir l’époux.

Ainsi l’âme chrétienne, qui vit avec l’Église, trouve dans l’automne ecclésiastique un riche champ à labourer ; elle est vraiment, comme l’Église, l’Épouse du Christ ; elle lève vers son Époux des yeux et un cœur chargés d’ardents désirs.

LES QUATRE-TEMPS DU MOIS DE SEPTEMBRE

Actuellement les Quatre-Temps tombent dans la troisième semaine du mois de septembre ; nous devons donc les insérer ici. Les Quatre-Temps du « septième mois » (Septembre, de septem = sept, était primitivement le septième mois, mars étant le premier) ont conservé, encore plus que tous les autres, leur caractère primitif d’action de grâces pour la moisson et de renouvellement spirituel, alors que les autres se font dans leur temps liturgique. Trois thèmes apparaissent dans les trois messes : la vendange, les fêtes juives du septième mois et le renouvellement spirituel. Primitivement, les Quatre-Temps d’automne étaient la fête de la vendange, d’où les nombreuses allusions au vin. Plus tard, les fêtes juives du septième mois sont le type de nos Quatre-Temps. A cette époque, les Juifs célébraient trois fêtes : la nouvelle année civile au début du mois, la fête de l’Expiation, jour de pénitence rigoureuse pour les Juifs, où le Grand-Prêtre pénétrait avec le sang des victimes dans le Saint des saints, et enfin la fête des Tabernacles, la joyeuse fête d’action de grâces pour la moisson, en même temps que commémoraison du campement des Juifs sous la tente pendant la traversée du désert. Les Quatre-Temps furent considérés comme la réalisation de cette fête juive des ombres. Enfin, les Quatre-Temps sont une grave époque de renouvellement spirituel pendant laquelle nous prions, nous jeûnons et nous devons faire pénitence. Donc, objet : action de grâces et pénitence.

Comme préparation à la semaine des Quatre-Temps, le pape Léon 1er nous adresse l’un de ses beaux sermons de carême : « La pratique du jeûne a donc été assignée aux quatre époques de l’année afin que, chaque fois qu’elles reviennent au cours de l’année, nous nous souvenions que nous avons un besoin incessant de purification et que, pendant toute la durée de cette vie sujette au changement, il faut nous efforcer d’expier par les jeûnes et les aumônes les péchés auxquels nous ont entraînés la faiblesse de la chair et la souillure des passions. Éprouvons donc un peu, mes bien aimés, la faim de nous soustraire, pendant un court moment, à notre besoin habituel, de telle sorte que nous puissions faire servir cela au soulagement des pauvres. Que le cœur des personnes charitables se réjouisse des fruits de leur bienfaisance ; alors, ayant semé de la joie, vous récolterez de quoi vous rendre heureux. L’amour du prochain, c’est l’amour de Dieu qui a mis la plénitude de la loi et des prophètes dans l’unité de ce double amour, afin que personne n’hésite à donner à Dieu ce qu’il a offert aux hommes. C’est pourquoi notre Maître et Sauveur a dit : Ce que vous aurez fait à l’un d’entre eux, c’est à moi que vous l’aurez fait. »

Symboles des temps de l’année. — Les féries des Quatre-Temps étaient, dans la primitive Église, de véritables fêtes de la nature ; elles nous montrent à quel point la liturgie des premiers âges prenait racine dans la nature. L’année liturgique est une véritable année de la nature ; de même, le jour liturgique est un véritable jour de la nature. Il nous est donc facile de comprendre que les quatre saisons de l’année aient également joué un rôle dans le symbolisme de l’ancienne Église.

Les premiers chrétiens ont emprunté ce symbolisme aux païens qui aimaient à personnifier les quatre saisons ; mais les chrétiens ont donné à ces saisons une signification plus profonde. Si, pour l’antiquité païenne, les saisons n’étaient que la personnification des forces de la nature, peut-être aussi le symbole de la vie terrestre, de l’abondance et de la croissance de la nature, elles devinrent pour les chrétiens l’image de la vie future, exprimée par cette formule concrète : le symbole de la résurrection de la chair ; car la mort et le renouvellement de la vie dans la nature étaient pour les chrétiens une image expressive de la mort et de la résurrection future. Aussi trouvons-nous ce symbolisme traduit tout particulièrement et, à l’époque la plus antique, exclusivement par l’art funéraire, dans les sépultures des catacombes et sur les sarcophages. Ce n’est probablement que plus tard, vers le Ve siècle, que ce symbolisme se développa et fut étendu à la vie du culte, à la vie d’union avec l’Église ; on s’en rend compte quand on remarque qu’à cette époque le regard des chrétiens se détourne un peu de la mort (martyre) pour se tourner de préférence vers la vie considérée comme le service de Dieu. C’est aussi à cette époque que Rome mit en honneur les Quatre-Temps, en leur donnant le sens d’une consécration des quatre saisons, temps où l’on offrait justement les fruits caractéristiques de ces saisons (froment, vin, huile). Ces produits sont d’ailleurs les symboles expressifs de l’Église, en même temps que la matière des principaux sacrements (Eucharistie, Baptême, Confirmation, Ordre, Extrême Onction). Nous comprenons donc que les chrétiens aient vu dans la quadruple couronne de fleurs, d’épis, de raisins et d’olives, tressée autour de l’Agneau divin, une image de l’année liturgique avec l’Eucharistie et les autres sacrements, -c’est-à-dire de la vie du culte, bref de la sanctification de l’année naturelle, du travail et de la nature. N’oublions pas que les fleurs printanières, les roses et les lis, tenaient une place d’honneur dans la vie liturgique des anciens chrétiens (la bénédiction de la rose d’or, le quatrième dimanche de carême, en est un vénérable souvenir. Dans la liturgie égyptienne, les roses et les lis étaient aussi employés comme offrandes : « On apportera des fleurs, on prendra des roses et des lis » XXIV, 3).

Nous voyons donc que le symbolisme des temps de l’année réunit les deux pensées fondamentales de l’art chrétien primitif, auxquelles nous pouvons ramener presque toutes les images et tous les symboles : espérance de la vie future et vie du culte. En premier lieu et dans les temps les plus reculés, il désigne donc la vie éternelle, la résurrection de la chair ; plus tard et dans un emploi plus restreint, il est le type de la vie en union avec l’Église.

Nous allons décrire maintenant les principales formes d’expression de ce symbole. Nous distinguerons deux périodes : l’art funéraire des quatre premiers siècles et l’art postérieur à partir du Ve siècle. Dans l’art funéraire, les saisons de l’année se présentent :

1. Sous l’image de têtes ou bustes, portant une couronne formée d’attributs des saisons.
2. Sous forme de scènes dans lesquelles des génies exécutent les travaux de la saison correspondante : tels des fleuristes (printemps), des moissonneurs (été), des vendangeurs (automne), et des cueilleurs d’olives ou des chasseurs (hiver).
3. Sous forme d’ornements : guirlandes, couronnes, bouquets, composés des produits de la saison.

Dans l’art du Ve siècle, le motif de la saison apparaît plusieurs fois sous la forme d’une couronne qui entoure l’image du Divin Agneau.

Sur tous les monuments, le motif se présentant comme d’ordinaire, les ornements empruntés aux plantes de la saison demeurent les mêmes : des fleurs (roses et lis) pour le printemps, des épis (mêlés également de fleurs) pour l’été, des pampres et des grappes (ainsi que d’autres fruits) pour l’automne, des rameaux d’olivier pour l’hiver.

Quelques exemples seulement ; Le plus beau et le plus classique se trouve à la crypte de Saint-Janvier, dans la catacombe de Saint-Prétextat, datant de l’époque de Septime-Sévère (IIIe siècle). La crypte est surmontée d’une voûte à quatre pans, dans laquelle a été pratiquée une large ouverture pour l’éclairage. Sur chacun des quatre pans, se déploient, en forme de cintre jusqu’à la fenêtre centrale, des guirlandes à quatre parties ; dans la première, elles sont formées de roses ; dans la seconde d’épis ; dans la troisième, de pampres ; dans la quatrième, de rameaux d’oliviers ; l’ensemble constitue une sorte de berceau de feuillage qui se noue aux quatre coins à de larges gerbes de fleurs et de fruits. Aux rameaux sont suspendus des nids d’où l’on voit sortir des becs entr’ouverts ; partout des oiseaux qui volent ou sont posés sur les branches. Le panneau de branches d’olivier, qui symbolise la froide saison d’hiver, est le seul à ne pas avoir d’oiseaux. Si ces panneaux témoignent déjà d’un grand amour de la nature, les peintures inférieures produisent le plus charmant effet. Au-dessous de ces quatre pans de la voûte, court une frise circulaire où sont représentés de nombreux enfants. Ici, jeunes garçons et jeunes filles cueillent des roses ; c’est le printemps. Là, ils coupent la moisson, la rentrent et la battent ; c’est l’été. Dans la troisième image, nous voyons la vendange en automne. Dans la quatrième, c’est la récolte des olives ; les échelles sont appuyées aux oliviers ; on rassemble les olives ; c’est l’hiver. Malgré les dégâts subis par la magnifique composition, on peut admirer ici la vie de la nature et l’amour de la nature ; les yeux se reposent avec plaisir sur tant de fraîcheur et tant d’innocence. Maintenant, rappelons-nous que le lieu où ces fraîches images de la nature dominent l’espace est un lieu de sépulture. Elles affirment bien haut et joyeusement la foi à la résurrection de la chair, et il nous semble entendre les anciens chrétiens chanter l’Alléluia devant la tombe de leur ami.

Le motif : On rencontre souvent le Bon Pasteur entouré des quatre génies des saisons, par exemple dans la catacombe « ad duas lauros », sur un sarcophage au musée du Latran (le Bon Pasteur porte la brebis ; à ses côtés, deux génies des saisons avec les attributs correspondants). Pour la deuxième période, dans laquelle l’Agneau Divin est entouré de la couronne des saisons, nous trouvons un beau spécimen dans une mosaïque de voûte de la chapelle de Saint-Jean l’évangéliste, au Latran (du Ve siècle) : nous voyons l’Agneau de Dieu avec un nimbe ; tout autour, une couronne à quatre parties, formée de roses et d’autres fleurs, d’épis, de grappes de raisins et d’olives. Ici, le symbolisme n’est plus aussi expressif, car nous n’avons pas affaire à une crypte funéraire. Nous pouvons penser à la résurrection du Christ, mais aussi à la sanctification de la nature par le Christ et, enfin, à tous ces motifs de la vie du culte qui ont été cités plus haut.

Si nous considérons la portée de ce symbole, nous pouvons dire que l’examen de l’époque moderne présente lui aussi son utilité. La joie de la nature et le sentiment élevé de la nature conviennent donc bien à l’antique Église qui a créé ce symbolisme et qui le perpétue aujourd’hui encore dans sa liturgie. A ce point de vue, la célébration des Quatre-Temps, tombée en désuétude, reprend toute sa valeur de sanctification et de consécration des saisons. Suivons toutes les indications que notre mère, l’Église, nous a laissées dans sa liturgie et approfondissons davantage le rôle de la nature dans le culte divin. Tressons réellement la couronne des quatre saisons autour du Divin Agneau eucharistique. Chantons et récitons avec une plus parfaite intelligence le Bénédicité et tous les psaumes de la nature. Entretenons la coutume de faire bénir les produits de la nature au cours de l’année : le vin de la Saint Jean, la rose d’or, le pain, les raisins, les plantes, la moisson. Mais honorons spécialement ceux que l’Église a empruntés aux saisons : le pain, le vin et l’huile. Faisons-les apporter par les fidèles à l’offrande. Nous pouvons aussi employer les fleurs, particulièrement les roses, pour l’ornementation de l’église. Dans certaines régions, on a l’habitude, le dernier dimanche d’octobre, de décorer l’église avec des couronnes et des fruits. C’est une sorte d’offrande. Les pauvres ont ensuite le droit d’emporter les fruits offerts.

De l’abondance des textes liturgiques qui intéressent notre sujet, retenons seulement deux passages : la Communion du XIIe dimanche après la Pentecôte unit le souvenir de la récolte à la vie liturgique : « Des fruits de tes mains, Seigneur, la terre sera comblée à satiété ; fais croître sur la terre le pain et le vin qui réjouit le cœur de l’homme. Que l’huile fasse resplendir de joie le visage de l’homme) que son cœur trouve sa force dans le pain. » La liturgie pense donc aussi bien aux produits de la terre qu’à l’Eucharistie. Ainsi, comme dans l’antique Église, à la vue des symboles des saisons, les pensées de la nature peuvent être appliquées au surnaturel et au culte. Mais la messe de Requiem conserve un souvenir particulièrement vénérable de notre symbole quand elle nous fait chanter, à l’Introït, devant le cercueil, le joyeux psaume 64, un psaume de moisson. Rappelons-nous que le premier verset tient lieu du psaume tout entier et chantons entre autres : « Tu couronnes l’année de la couronne de tes biens, tes champs ruissellent de graisse. Les campagnes rassasiées regorgent dans l’abondance, les collines se ceignent d’allégresse, se couvrent de troupeaux de brebis… » Le Bon Pasteur n’est-il pas là, en quelque sorte, avec sa brebis, devant le cercueil de la messe des morts, entouré des quatre génies des saisons ? Ici, le symbole des saisons se présente donc, à travers les siècles, comme l’image de la résurrection de la chair dont il dresse le monument. Nous voyons comment la liturgie nous a conservé les pensées de la primitive Église ; nous n’avons qu’à les réveiller de leur long sommeil.

Voir commentaire au Mercredi des Quatre-Temps.

Voir commentaire au Vendredi des Quatre-Temps.

Voir commentaire au Samedi des Quatre-Temps.

Les Quatre-Temps de Septembre ou Quatre Temps d’automne https://www.introibo.fr/Les-Quatre-Temps-de-Septembre

Voir aussi :

  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Cyrille Vogel, introduction aux sources de l’histoire du culte…  
  Daniélou, Les Quatre-Temps de Septembre et la Fête des Tabernacles  

Voir aussi :

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